• Si c'est aimer, Madame, et de jour, et de nuit
    Rêver, songer, penser le moyen de vous plaire,
    Oublier toute chose, et ne vouloir rien faire
    Qu'adorer et servir la beauté qui me nuit :
    
    Si c'est aimer que de suivre un bonheur qui me fuit,
    De me perdre moi même et d'être solitaire,
    Souffrir beaucoup de mal, beaucoup craindre et me taire,
    Pleurer, crier merci, et m'en voir éconduit :
    
    Si c'est aimer que de vivre en vous plus qu'en moi même,
    Cacher d'un front joyeux, une langueur extrême,
    Sentir au fond de l'âme un combat inégal,
    Chaud, froid, comme la fièvre amoureuse me traite :
    
    Honteux, parlant à vous de confesser mon mal !
    Si cela est aimer : furieux je vous aime :
    Je vous aime et sait bien que mon mal est fatal :
    Le coeur le dit assez, mais la langue est muette. 

    Sonnets pour Hélène


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  • Vous êtes si jolie

    O mon bel ange blond !

    Que ma lèvre amoureuse en baisant votre front

    Semble perdre la vie !

    Ma jeunesse, mon luth et mes rêves ailés

    Mes seuls trésors hélas ! je les mets à vos pieds

    Vous êtes si jolie !

     

    Vous êtes si jolie

    O mon bel ange blond !

    Que mes yeux éperdus partout vous chercherons.

    Pardonnez leur folie !

    Je ne suis que poète et dans ma pauvreté

    Je compte sur mon coeur et sur votre bonté

    Vous êtes si jolie !

     

    Vous êtes si jolie

    O mon bel ange blond !

    Que mon amour pour vous est un amour profond

    Que jamais on oublie !

    Pour vous plaire la mort ne me serait qu'un jeu ;

    Je deviendrais infâme et je renierais Dieu

    Vous êtes si jolie !

     

    Le Chevalier à l'Etoile

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  • Le jet d'eau

    Tes beaux yeux sont las, pauvre amante !
    Reste longtemps, sans les rouvrir,
    Dans cette pose nonchalante
    Où t'a surprise le plaisir.
    Dans la cour le jet d'eau qui jase
    Et ne se tait ni nuit ni jour,
    Entretient doucement l'extase
    Où ce soir m'a plongé l'amour.

    La gerbe épanouie
    En mille fleurs,
    Où Phoebé réjouie
    Met ses couleurs,
    Tombe comme une pluie
    De larges pleurs.

    Ainsi ton âme qu'incendie
    L'éclair brûlant des voluptés
    S'élance, rapide et hardie,
    Vers les vastes cieux enchantés.
    Puis, elle s'épanche, mourante,
    En un flot de triste langueur,
    Qui par une invisible pente
    Descend jusqu'au fond de mon coeur.

    La gerbe épanouie
    En mille fleurs,
    Où Phoebé réjouie
    Met ses couleurs,
    Tombe comme une pluie
    De larges pleurs.

    Ô toi, que la nuit rend si belle,
    Qu'il m'est doux, penché vers tes seins,
    D'écouter la plainte éternelle
    Qui sanglote dans les bassins !
    Lune, eau sonore, nuit bénie,
    Arbres qui frissonnez autour,
    Votre pure mélancolie
    Est le miroir de mon amour.

    La gerbe épanouie
    En mille fleurs,
    Où Phoebé réjouie
    Met ses couleurs,
    Tombe comme une pluie
    De larges pleurs.

    Charles Baudelaire 1821- 1967(Les Fleurs du Mal)

    Transcrit par Amandin le Troubadour pour Yzelle****

    illustration d'Infini-Gifs


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